Versailles au-delà du château : festivals, jardins et art de vivre racontés par son maire

De Molière aux festivals contemporains, en passant par les secrets cachés de la ville : et si Versailles ne se résumait pas à son château ? Dans un entretien exclusif, François de Mazières dévoile les trésors culturels, jardins et festivals qui font battre le cœur de la cité royale.

Bien sûr, la culture occupe une place centrale à Versailles, entre héritage du Roi-Soleil et projets contemporains. Dans un entretien accordé à Sortiraparis, le maire François de Mazières revient sur son parcours marqué par la culture et nous ouvre les portes d’une ville qu’il décrit comme un lieu "à la fois historique et moderne". Passionné de théâtre et d’architecture, il partage ses coups de cœur pour des artistes, des lieux et des événements emblématiques qui façonnent l’identité culturelle de la cité royale.

Force d’attraction du château, importance de festivals comme le Mois Molière ou Histoire de Lire, vitalité d’un tissu associatif... Un tour d'horizons des choses à voir dans la ville. À ses yeux, "Versailles, c’est l’alliance du passé et de la modernité", une ville accessible et vivante, où l’art de vivre à la française se découvre au détour d’une balade, d’un marché, ou d’un spectacle en plein air. En route pour une visité guidée de Versailles... par son maire !

Sortir à Paris : Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

François de Mazières : J’ai un parcours atypique, mais toujours très lié à la culture. J’ai été conseiller pour la culture auprès du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, puis directeur de la Fondation du Patrimoine avant de créer et présider la Cité de l’Architecture et du Patrimoine. Haut fonctionnaire, j’ai également été sous-préfet puis inspecteur des finances pendant plusieurs années. Lorsque j’ai été élu maire, j’étais déjà adjoint à la culture depuis deux mandats. J’ai aussi été à l’origine du Loto du patrimoine lorsque j’étais député en 2017, et j’ai présidé la Fédération des élus et cultures de France durant plusieurs années. Aujourd’hui, je co-préside la commission culture de l’association France Urbaine avec le maire de Clermont-Ferrand. À côté de cela, j'ai deux passions : celle du théâtre et celle de l'architecture et de l'urbanisme. Je viens d'ailleurs de sortir un livre sur le sujet, Pour une ville belle : 10 propositions pour une ville où il fait bon vivre. La culture, c'est mon truc, et Versailles, c'est ma vraie passion.

À titre personnel, quels sont vos sorties préférées, vos spectacles ou musées préférés ?

Comme je le disais, j’ai une passion pour le théâtre. Très jeune, je suis entré au Conservatoire de Versailles, qui était alors une antichambre de celui de Paris. Je n’ai jamais voulu devenir acteur parce que je voulais faire des études classiques, mais cette passion ne m’a jamais quitté. Donc oui, sortir au théâtre reste essentiel pour moi.

Il y a une pièce que vous recommandez en particulier ?

J’ai vu beaucoup de spectacles à Avignon, plutôt dans la culture du off. Certains y réussissent très bien, comme Jean-Philippe Daguerre, qui présente régulièrement ses avant-premières à Versailles, ou Alexis Michalik, que j’avais découvert avant qu’il ne soit connu et qui est venu deux années de suite chez nous. J’ai aussi beaucoup travaillé avec Éric Bouvron, un véritable talent : il a obtenu en 2016 le Molière du meilleur spectacle privé avec Les Cavaliers, adapté de Joseph Kessel. Cette année encore, il a rencontré un beau succès, d’abord à Versailles puis à Avignon.

Si vous deviez décrire la commune à quelqu'un qui ne la connaît pas, comment vous la définiriez ?

Je pense que Versailles a un potentiel extraordinaire, avec plus de 8 millions de visiteurs chaque année au château. Comme Cannes avec son festival, la ville bénéficie d’une puissance d’attraction unique, incarnée ici par le château. La question est de savoir comment valoriser cet atout culturel exceptionnel. Nous avons défini plusieurs axes : d’un côté, la culture des XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles, liée à l’image du Roi-Soleil, et de l’autre, une vision contemporaine d’une ville moderne et attractive. Aujourd’hui, avec les enjeux environnementaux, on aspire à une ville plus végétalisée et équilibrée, qui correspond aux attentes actuelles. Versailles attire parce qu’elle conjugue beauté visuelle, dynamisme et présence de la nature, avec ses grandes allées et ses arbres remarquables.

Et qu'est ce qu'on trouve chez vous et qu'on ne trouve nulle part ailleurs ?

On a une Biennale d’Architecture et de Paysage, que j’ai créée, et qui est vraiment unique. Elle nous est propre et repose sur une alliance particulière entre réflexion architecturale et paysagère. Versailles, c’est la ville de Le Nôtre pour le paysage, mais aussi de Mansart et de Le Vau pour l’architecture. C’est ici également que se trouvent l’École nationale du paysage, la seule en France, et l’École d’architecture de Versailles, installée dans les Petites Écuries. À côté de cela, l’offre culturelle et touristique est riche : de très bons restaurants, des hôtels comme Le Grand Contrôle créé par Stéphane Courbit au sein du château, ou encore l’Hôtel des Lumières. On peut citer aussi le Trianon.

Au rez-de-chaussée de l’Ancienne Poste, Les Sept Lieux, confiés à de jeunes restaurateurs, proposent une guinguette, et à côté se trouve le lieu d’exposition de la ville, où l’on présente actuellement Versailles vu du ciel. Au dernier étage, une médiathèque est en cours d’ouverture. Sans oublier l’Espace Richaud, installé dans l’ancienne chapelle de l’hôpital Royal dessinée par Charles-François Darnaudin, qui constitue un autre beau lieu de culture.

Selon vous, quelle est la balade parfaite à Versailles ?

Une balade autour de l’art de vivre à la française. Bien sûr, la visite du château et du parc est incontournable. Mais les touristes apprécient aussi le marché Notre-Dame, considéré comme le plus beau d’Île-de-France. Une autre façon de découvrir la ville est d’explorer son architecture du XVIIIᵉ siècle, avec de très belles églises : Notre-Dame, construite par Mansart et récemment rénovée, que Louis XIV a connue, ou encore la cathédrale Saint-Louis, édifiée soixante-dix ans plus tard par son petit-neveu Jacques Hardouin-Mansart de Sagonne.

Il y a aussi des lieux chargés d’histoire, comme la salle du Jeu de Paume, où fut prononcé le fameux serment de 1789. C'est Mirabeau qui se lève et qui dit "Vous sortirez par la force des baïonnettes". Le Potager du Roi reste un autre site incontournable. Enfin, il y a les petites boutiques de la rue du Vieux Versailles et les Carrés Saint-Louis.

Vous avez recommandé un restaurant en particulier. Quels sont les deux autres restaurants qui vous viendraient naturellement à l'esprit ?

Autour de la place du marché, il y a plein de restaurants, ou encore au Passage des Deux Portes. Il y a aussi d'excellentes tables un peu haut de gamme, comme La Table du 11. Il y a aussi plein de restaurants dans la rue de Satory et autour des Carrés Saint-Louis. Après, il y en a d'autres partout.

Quels sont les événements les plus emblématiques de Versailles, que la ville organise et qui vaut le déplacement selon vous ?

Le Mois Molière, bien sûr ! Un mois entier consacré au spectacle, au théâtre et à la musique. Ensuite, il y a les rendez-vous récurrents comme le festival Histoire de Lire, dédié à la littérature et à l’histoire au sens large. Tout au long de l’année, on retrouve aussi des expositions, à l’Ancienne Poste, au musée Lambinet ou encore à l’Espace Richaud, qui accueille de l’art contemporain. Sans oublier les fresques réalisées dans les quartiers modernes en partenariat avec Quai 36.

Quel est votre plus beau souvenir de votre mandat de maire au sein de votre ville ?

Comme c'est proche, les Jeux Olympiques ont été un moment incroyable pour tous les Versaillais et les spectateurs du monde entier. C'était un très beau moment.

Parmi les choses que vous aimeriez mettre en place aujourd'hui sur le long terme, il y a des choses qui vous viennent en tête ?

Deux nouveaux quartiers sont en cours de réalisation. L’objectif est de concevoir des espaces du XXIe siècle, attractifs et conçus par de bons architectes. Ce sont des projets d’envergure qui mobilisent fortement les équipes. L'idée pour nous, c'est de faire venir les amateurs d'architecture pour visiter ces quartiers. Parmi les réalisations déjà visibles, on compte le quartier des Chantiers, totalement réaménagé. On y trouve de grandes signatures : Christian de Portzamparc, Patrick Bouchain – auteur d’un remarquable bâtiment qui fut le siège de Nature et Découvertes –, mais aussi Élisabeth de Portzamparc. Un dernier édifice a récemment vu le jour, signé Carl Fredrik Svenstedt, conçu comme une serre végétale.

Ce quartier a aussi bénéficié du travail de Jean-Michel Desvignes, grand paysagiste français, et de Jean-Marie Dutilleul, spécialiste des grandes gares de la SNCF et concepteur de la gare des Chantiers. On a vraiment ce contraste entre une ville à l'architecture du XVIIIe, du Grand Siècle, et de nouveaux quartiers à l'architecture du XIXe siècle, avec une attention particulière portée aux arbres et à l’environnement. Pour les visiteurs, la place du marché, c'est aussi un vrai lieu d’attraction. On a beaucoup d'Américains aussi, qui viennent se balader à vélo. On a plusieurs compagnies privées qui organisent ces balades en ville et dans le parc.

Est ce qu'il y a des sorties gratuites ou à petits prix que vous recommandez aux familles et aux jeunes dans votre commune ?

Je pense à l’Ancienne Poste avec ses espaces d’expositions et le restaurant Les Sept Lieux, situés en plein cœur de la ville, très facilement accessible depuis les gares. C’est un lieu vivant. Nous y avons organisé une grande exposition consacrée à l’histoire des jeux vidéo (Game Story, NDLR). Un véritable succès. Réalisée en partenariat avec une association qui réunissait à la fois les jeux et les machines, elle a attiré beaucoup de monde : les visiteurs venaient surtout pour jouer. Il fallait même s’inscrire, car malgré la taille du lieu, il fallait réguler l’affluence, à raison de 200 personnes par heure.

Est ce qu'il y a une ville d’Ile-de-France ou même un arrondissement de Paris que vous trouvez hyper intéressant pour son animation culturelle ?

Il y a tellement de choses à Paris… Je n'identifie pas au niveau des arrondissements. Je dirai le 5e. Non mais c'est le 11ᵉ où il y a plus de choses à voir, en réalité. Il y tous les ateliers d'artistes aussi. Partout, en fait.

Est ce qu'il y a un sujet culturel, sportif ou loisir qu'on n'a pas évoqué qui vous tient à cœur ?

Nous avons ces deux grands rendez-vous en mai et juin : la Biennale, puis le Mois Molière qui fêtera bientôt ses 30 ans. Ce festival a été créé à l’origine avec une "charrette itinérante", une reconstitution de celle de Molière. Avec Francis Perrin, qui était directeur du théâtre Montansier, on allait jouer les farces de Molière dans les quartiers. C’était une expérience assez extraordinaire. Aujourd’hui encore, en juin, il y a des représentations partout : on installe des tréteaux un peu partout et les comédiens jouent dans la rue. C'est un moment assez étonnant.

Est-ce qu'il y a une association qui vous tient à cœur, que vous trouvez vraiment intéressante, touchante, à mettre en avant ?

Il faut reconnaître qu'il y a de nombreuses associations, notamment autour du thème des jardins potagers. C’est une particularité de la ville : on en trouve un peu partout, y compris dans le grand quartier social Bernard Jussieu, organisé autour de petits jardins. J’ai aussi développé ce type d’espaces dans d’autres secteurs, et dans le nouveau quartier de Gally, on en compte déjà plus de 450 avec l’hôtel Le Bout du Parc. Constitué de petits chalets en bois, presque au cœur du parc du château, l'hôtel est bordé d'un ensemble de 540 logements, sur un site de 20 hectares dont la moitié est classée en zone agricole. Dans le même quartier, des jardins familiaux sont créés et confiés aux habitants, perpétuant une longue culture de jardins comme ceux installés près de la Pièce d’eau des Suisses.

Mais les associations ne se limitent pas aux jardins. Il y a la musique aussi avec les chorales. Le Mois Molière, c'est un moment fort pour elles, puisqu’elles s’y préparent toute l’année avant de se produire. Ça créé une émulation. On a beaucoup d'associations sportives aussi, avec une forte tradition de rugby et un football en plein développement, grâce au dynamisme du FC Versailles soutenu par un investisseur qui insiste sur l’image de qualité de Versailles. Enfin, dans le registre de la nature et du patrimoine, il faut également citer la manifestation Esprit Jardin.

Une phrase que vous diriez aux lecteurs de Sortiraparis pour leur donner envie de découvrir votre ville autrement ?

D’abord, c’est la facilité d’accès. Ensuite, c’est un véritable bol d’air, un art de vivre à la française. Paris reste une ville magnifique, mais souvent critiquée pour sa saleté. Ici, nous sommes moins connus, mais c’est beau, reposant et agréable.

Pas d'autres points pour vous?

C’est vrai, Esprit Jardin est une très belle manifestation, qui attire de plus en plus de monde. Elle ouvre la saison des grands événements consacrés aux jardins et se déroule tous les derniers week-ends du mois d’avril, dans le potager du roi, devant la cathédrale et dans tout le quartier Saint-Louis. On y trouve de nombreux stands proposant des plantes.

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Photos : l’Ancienne Poste - Copyright Pierrick Daul / Ville de Versailles | L’Espace Richaud lors de la biennale d’architecture et de paysage Copyright Pierrick Daul / Ville de Versailles | Esprit Jardin Copyright Ville de Versailles | La statue Molière Copyright Pierrick Daul / Ville de Versailles | Le Mois Molière qui fêtera sa 30ème édition en juin 2026 Copyright Ville de Versailles

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